Violaine rogne« Wat ass Liewensqualitéit? » avec Violaine Wallerich

Violaine Wallerich est assistante parentale, elle garde un petit groupe d'enfants à la maison pendant que leurs parents travaillent. Nous lui avons demandé, ce que signifie pour elle « une bonne qualité de vie ». Nous avons également discuté avec elle sur l'importance du facteur « temps » pour assurer une bonne qualité de vie.

Personnellement, ce que j’entends par avoir une bonne qualité de vie est ce qui suit : la qualité de vie est un terme plutôt vaste qui englobe de nombreux points très différents qui peuvent avoir une influence justement sur ce qu’est la qualité de vie. Ce qui, pour moi, joue un grand rôle, ce à quoi je pense spontanément, est le respect : le respect envers la famille, envers les amis, envers l’environnement, et aussi, très important, le respect envers moi-même.
Le fait de pouvoir avoir ma propre opinion, et la défendre, jouent aussi un grand rôle pour moi dans ma définition personnelle de qualité de vie. Que je puisse décider, à tout instant, comment moi, je veux organiser ma vie. De nos jours, nous sommes assez influencés par la société, ce qui fait que souvent, nous ne pouvons pas agir comme nous aimerions le faire. Parfois il nous faut dire « STOP ! » et il nous faut prendre le temps d’écouter ce que notre for intérieur veut nous communiquer. C’est alors le moment de nous arrêter pour ressentir comment nous allons vraiment, afin de pouvoir changer quelque chose en vue d’un mieux-être.

Dans le temps, tu as travaillé pour une banque. Tu t’es décidée ensuite de faire une formation pour devenir assistante parentale. Pourquoi as-tu démissionné d’un travail bien payé et sûr, pour entreprendre ce nouveau projet ?

Autrefois, mon rêve était de travailler en tant qu’institutrice, rêve que je n’ai pas pu réaliser à l’époque. Après un certain nombre d’années où j’ai travaillé pour une banque, je me suis dit : « Si un jour, tu veux réaliser ton rêve de travailler avec des enfants, c’est maintenant ou jamais ! » C’est alors que j’ai commencé la formation pour devenir assistante parentale et j’ai démissionné de la banque.

BD Cacef jvalente MG 1883 compresseLa garde à domicile est la forme de garde d’enfants qui, pour moi, se rapproche le plus de la famille nucléaire (Kernfamilie) elle-même : un petit groupe d’enfants, une seule personne de contact qui ne change pas selon les horaires, comme dans une crèche par exemple. Ainsi, les enfants peuvent établir des liens affectifs profonds, à moyen voire long terme dans une ambiance familiale, où règnent confiance et calme.
Ce que je veux aussi, c’est offrir une possibilité de garde d’enfants aux parents qui ont le désir ou l’obligation d’aller travailler, pour qu’ils puissent le faire en toute tranquillité et confiance, sachant leurs enfants entre de bonnes mains.

Personnellement, j’ai passé beaucoup de temps dans les embouteillages pour me rendre au travail et ce travail-ci me permet de travailler depuis la maison. En même temps, je suis mon « propre chef » et je peux m’organiser comme je veux. La garde d’enfants est un travail intensif, du point de vue émotionnel et aussi temporel, mais pour moi, c’est du temps investi judicieusement et utilement. Je me sens pleinement satisfaite du travail que je fais maintenant, car il a du sens.

Chaque enfant a son rythme de développement individuel. Comment vois-tu ce phénomène que, dès que les enfants intègrent une institution, on a l’impression qu’ils « doivent » avoir atteint tel ou tel seuil de développement à un certain âge? Pourquoi est-ce important de s’adapter au rythme personnel des petits enfants ?

Entre 0 et 3 ans, les enfants passent par différentes phases de développement, c’est passionnant si on la chance de pouvoir en être le témoin. J’imagine que dans une institution comme une crèche, par exemple, où les groupes sont plus grands, il faut davantage de structure et il y a, par conséquent, moins de libertés.

Le cadre dans lequel je garde les enfants s’apparente plus à celui d’une grande famille. C’est plus facile alors de s’adapter aux besoins des enfants, de les laisser jouer librement et de favoriser ainsi un développement individuel, tout à leur aise. Pour ceci, il faut un climat de confiance. Si les enfants se sentent bien et en confiance, ils peuvent se développer aisément et librement.

L’avantage de la garde à domicile est, bien sûr, également le nombre d’enfants réduit : il n’y a qu’un petit groupe, pas plus que cinq enfants à la fois, parfois moins. Le contact social entre les petits est favorisé, comme il y a un nombre limité d’enfants. En général, les petits ont entre 3 mois et 4 à 5 ans. Le fait qu’ils ont des âges différents est aussi un avantage pour le groupe, comme les petits ont l’occasion d’apprendre des plus grands.

Dans une crèche ou une maison relais, les conditions sont évidemment tout à fait différentes. Il faudrait, en fait, des groupes plus petits, selon l’âge des enfants, et certainement plus de personnel qui encadre les enfants.

BD Cacef jvalente MG 2910 compresseConcernant le sujet „temps“ et „lien affectif“ dans la petite enfance : j’ai entendu souvent que « le lien vient en premier lieu, avant l’éducation » (en allemand : „Bindung kommt vor Bildung“). Néanmoins, ni notre société ni notre système économique ne sont conçus de cette façon. On a plutôt l’impression que tout est mis en œuvre pour qu’une mère, un père, retournent le plus vite possible à leur poste de travail, pour faire tourner l’économie.
Comment vois-tu cette nouvelle évolution dans notre société ?

Ce ne sont pas vraiment les enfants qui bénéficient de cette nouvelle évolution, je pense. Entre 0 et 4 ans, les enfants ont besoin de pouvoir établir des liens affectifs en toute confiance et sécurité. Un environnement de confiance, de calme et de sécurité, c’est ce qui est le plus important. À titre d’exemple, à cet âge-là, les rituels sont primordiaux ; ils donnent un sentiment de sécurité à l’enfant et le rassurent. Le changement d’éducateur et d’éducatrices, de salles etc. n’est pas propice à établir un climat de confiance et de sécurité pour de très jeunes enfants.

Malheureusement, les parents qui confient leurs enfants aux assistantes parentales n’ont pas les mêmes aides de l’État : ils n’ont pas droit aux 20 heures de garde gratuites. A mon avis, ce qui l’emporte sur l’apprentissage précoce des langues sont les liens affectifs profonds et sûrs pour les enfants en bas âge.

BD Cacef jvalente MG 1788 compresséA ton avis, est-ce que les enfants de nos jours ont encore assez de „temps libre“? Pourquoi l’ennui et des plages de temps non planifiées sont si importants pour les enfants ?

Disposer de temps non planifié càd. de temps libre est d’une importance primordiale pour les enfants. Certains parents contribuent au surmenage de leurs enfants en planifiant chaque minute de leur horaire qu’ils ne passent pas à l’école ou dans une institution. Le résultat de cette planification à la minute est que nos enfants perdent toute spontanéité et tout esprit créatif. Ils s’habituent à ce que quelqu’un fasse leur planning et ils ne savent plus s’occuper eux-mêmes. Or, s’ennuyer tout comme jouer tout seul, apprendre à s’occuper soi-même sont des pas essentiels sur le chemin du développement vers l’âge adulte et vers l’épanouissement d’une personne. Faire ce dont j’ai envie est un privilège de la petite enfance et en même temps primordial pour apprendre à se connaître soi-même, savoir ce qu’on aime faire, ce pour quoi on peut se passionner et s’engager.

Nos enfants aujourd’hui doivent passer beaucoup de temps dans des structures et passent d’un groupe à l’autre : de la maison-relais tôt le matin à l’école, de l’école à la cantine, de la cantine de retour à l’école ou à la maison-relais… A longueur de journée, ils sont entourés en permanence par des gens et ne sont jamais au calme, comme il y a toujours du bruit à ces endroits. Je ne juge en aucun cas les parents qui sont obligés de procéder ainsi, car le travail, la société les y obligent. Ce serait à l’État de réfléchir ensemble avec tous les acteurs concernés du secteur de la petite enfance comment améliorer cette situation. Nous sommes en train de produire des enfants stressés. Le rythme journalier d’une famille est dicté par le stress. Ce n’est pas normal, à mes yeux, que déjà des petits enfants ressentent des effets de stress.

Nous pouvons acheter beaucoup de choses, mais nous ne pouvons acheter ni la santé ni le temps. N’oublions pas que les enfants d‘aujourd’hui formeront la société de demain. Quel modèle, quel exemple nous, les adultes, leur donnons, en laissant le stress gérer notre vie et notre quotidien, au prix de notre santé et au prix de liens affectifs profonds et sûrs avec nos enfants ? Quels adultes de demain sommes-nous en train d’éduquer avec ce modèle sociétal qui prêche aux jeunes parents de regagner au plus vite leur poste de travail et de placer leurs bébés dès 3 mois dans une crèche ?

Ne serait-ce pas plus judicieux d’employer tout cet argent versé dans la construction d’infrastructures de garde d’enfants (crèches, maison-relais…), dans le salaire d’innombrables éducatrices et éducateurs, dans tant d’heures gratuites à passer dans les crèches, d’employer toutes ces sommes à aider les jeunes mères et/ou pères à rester à la maison, auprès de leur bébé, au moins durant les trois premières années de sa vie ? Ce sont des années déterminantes pour la suite de toute une vie ; certains disent que ce sont les années les plus importantes où tout se joue.

Merci, Violaine, pour cet entretien passionnant 

Jorge Valente a réalisé les photos d'enfants de cet article chez notre partenaire CACEF au Brésil, nous l'en remercions.

 


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